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Rêvé le 15 janvier 2013 - ipseaure avait 43 ans Ajouter ce rêve à vos favoris

Bonjour à tous,

 

Pour mon introduction sur ce site j'ai choisi de vous soumettre le récit d’un rêve dont la présente version est particulièrement proche des notes que j’en avais saisies au réveil, en remémoration immédiate, et, à mon sens, une des moins altérées par la mise en forme textuelle.

     L'autre intérêt de ce rêve est qu'il comporte une variété et une densité importante des types d’articulations les plus caractéristiques de mes rêves que j’appelle des SYNESTHESIES ONIRIQUES, (tel qu'il existerait des fusions ou des mutations formelles par lesquelles une sensation initialement manifestée se convertirait directement en une sensation d’un autre registre ( une couleur en odeur,  un son en une forme visible, un goût en sensation tactile, etc…)).

Pour éclairage minimum du contexte du rêve, je précise que mes activités personnelles relèvent toutes des arts plastiques, que je n’ai jamais eu d’atelier sur pilotis en bord de mer mais qu’adolescent, je peignais et dessinais sur une plate-forme dans un grand arbre.

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RELEVÉ DU RÊVE:

C’est une porte connue de moi.
Comme étant celle de mon atelier sur pilotis, mobile l’atelier, au bord/sur/dans la mer, un transhumant qui me fait faire des kilomètres.
Je l’ai repéré facilement, l’atelier… il déambulait au large de la plage à longues enjambées. Sur des fonds de deux à trois mètres, pas plus. Je me demande ce qu’il va chercher là-bas. Je crois qu’il fais ça pour m’emmerder.
Aujourd’hui, ça va encore. Mais ça m’oblige quand même à l’approcher à la nage.
En douceur…   Le farouche, c’est l’escalier ;  il faut surtout le saisir par la rambarde avant de poser le pied parce que la déambulation ne s’arrête pas tout de suite pas tant que je n’aurais pas posé la main sur la table, là-haut.
Ce qui m’étonne c’est de voir comment les pilotis pourtant épais cylindriques  couverts de pédoncules
blanchâtres peuvent fendre l’eau sans un remous et sans autre sillage qu’une hécatombe de posidonies arrachées au fond par le raclage des basses poutres.
Il y a toujours une appréhension à vouloir toucher un objet dont on sait par avance qu’il aura un comportement imprévisible.
Donc je touche. La porte frémit, se creuse d’un réseau de sillons écailleux, la poignée rien qu’à y penser se dérobe sous forme de poire rétractile… Mais pas comme le pas de la porte. Lui , il est mou. Ce pas s’étire comme un bâillement horizontal.
L’intérieur reçoit assez mal non plus, envahi de raies de lumière verticales qui donnent envie de repousser: L’atelier est encombré de faisceaux de lamelles. Comme des fanons de baleine. Ce sont eux qui débitent la lumière en filasse. Ca pousse en bosquets à partir des habituelles zones de frottement.
Je me dis que j’aurais dû raser cet atelier depuis longtemps.
La friche de lanières a repoussé de soixante centimètres au moins depuis le dernier entretien.  Ce sont les arrêtes des meubles et les lattes du plancher qui sécrètent le plus; il en sort comme des lamelles de céramique souple bleuissantes qui ne cassent plus lorsqu’elles s’adossent les unes aux autres en massifs denses et vous empêchent de marcher sur le sol .
 Les massifs me repoussent vers le haut par saccades en forçant sur les jambes. Un pas en avant  c’est un pas vers le haut. Pas le choix.
Et on se retrouve ligoté au plafond qui lui est imberbe, allez savoir comment. Et j’essaye de me raccrocher à l’étau de fonte.
Il me trahit comme le reste en se difractant en lames pétillantes qui refusent l’empoignade.
Les sonorités fluides qui se déployaient au revers des objets depuis l’heure du rendez-vous deviennent  des couleurs faites d’un frétillement microscopique qui lancinent sous les doigts. Et c’est ce frétillement dans la masse qui rend maintenant les surfaces pénétrables au regard par endroits. Ou plutôt, pénétrables par moments, là où le regard s’attarde s’il parvient à s’attarder. Car ces couleurs font glisser l’attention de côté.  La volonté de déplacement est incluse dans la couleur comme une composante matérielle qui agirait directement  sur les muscles.
 Comme j’essaye encore de défricher un espace autour de moi, la danse de la forêt de lanières s’accentue et se débrouille pour me déverser par la fenêtre.
Des torsades m’enveloppent et me transportent en un faisceau continu vers la surface de la mer, à travers le bois de la plate-forme.
Elles m’ont pris la couleur des mains: Un saumon clair qui est absorbé par contact de la peau et qui entraîne derrière lui un rouge sombre et des verts tendres. Mon corps est pillé de toute coloration.
Non seulement mes jambes ne me supportent plus, empêtrées dans ce faisceau de couleur autoritaire, mais en plus, je ne peux plus me voir.
Les spaces m’empêchent de me contrôler, vaincu par la transparence. Et j’ai conscience que si je ne me vois plus, c’est parce que toutes mes couleurs, converties une à une en 1 porteurs, ont des vitesses syndépendantes.
Et ce qui fait que les couleurs osent faire mouvement, c’est que je n’avais jamais remarqué le rythme de chacune.
 Il a fallu qu’elle se réunissent en dehors de moi pour se mettre à onduler et m’entraîner vers la mer dans une déglutition continue.
C’est alors que je m’aperçois que je suis moi-même le mouvement qui s’écoule et se dilate parmi les matériaux. Les spaces me retournent vers un état fluide qui accélère avec une cadence empêchant totalement de se concentrer.
Je perçois bien clairement ma vague qui s’étend en ondes concentriques. Mon centre, alvéolaire, est bien net mais, en bordure, je tends à disparaître en frissons brouillés.
Je constate que je m’occupe malgré moi d’ordonner le tapis que forment les débris de posidonies à la surface de l’eau ; c’est cela ma forme à présent; Une présence dans le motif flottant. Un ordre particulier entre des copeaux d’algues qui se rassemblent en essaim plat, à la surface de l’eau.
L’atelier s’éloigne. Heureusement qu’il ne fait aucun remous, il m’aurait disloqué, heureusement pas le moindre je me le répète. ça, je suis bien d’accord avec nous-mêmes…
Je ne vois plus mais je ressens partout sur moi le ruminement du soleil qui fait se recourber sur eux-mêmes en petites tuiles cannelées les débris flottants de posidonies .
     Ensembles nous me formons et oscillons et ressentons le courant tiède qui me parcours
J’espère que rien ne viendra par en dessous
Il faut attendre que l’atelier repasse.
Ou alors rejoindre le poteau du littoral. Celui qui est fiable.

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